Bonjour, bonsoir, j'espère que vous allez bien! Aujourd'hui je suis heureuse de partager cinq de mes derniers coups de coeur cinématographiques. D'autant plus que c'est une sélection que j'affectionne particulièrement.
Au programme : 1 film espagnol, 1 film franco-suisse, 2 films français et 1 film américain.
10/08/2020 : Eva en août de Jonas Trueba (2020).
Cinquième long-métrage pour ce cinéaste espagnol, Eva en août est une vraie pépite qui rafraichira votre été et réchauffera votre hiver.
Se déroulant comme un dialogue entre Eva et la ville de Madrid - où elle décide de passer la première quinzaine du mois d'août - le film nous offre un double portrait, une double immersion. Ainsi on entre dans le quotidien de cette femme de 30 ans et on découvre la capitale en déambulant dans ses rues et en y rencontrant ses habitants.
Tout comme le personnage principal, on se laisse porter par les évènements qui s'enchainent comme une feuille emportée par le vent et on ne peut pas dire que ce soit désagréable!
D'Eva on ne sait presque rien et les éléments sur son passé sont presque inexistants. C'est justement là que réside toute la prouesse du scénario. Bien qu'elle soit conçue comme un personnage du présent, le fait qu'elle soit de tous les plans nous pousse inévitablement à nous sentir proche d'elle.
L'autre caractérisation d'Eva c'est qu'elle fait parler les autres sans se révéler ou se livrer à nous. Ce sont ses contradictions qui nous charment et sa naïveté qui nous touche de plein fouet.
La séquence qui m'a le plus émue est celle où elle tombe sur son ex devant la billetterie d'un cinéma indépendant. Cela fait des mois qu'ils ne se sont pas vus, la tension mêlée à la tendresse sont présentes. Cette captation de sentiments si intenses m'a fait verser quelques larmes que je n'ai évidemment pas réussi à retenir.
Eva en août est une exploration de ce que c'est d'être une femme de nos jours. De nombreux thèmes, tous plus intéressants les uns des autres, sont développés comme la maternité, la sororité, l'indépendance.
Enfin, comme le personnage principal, ce film donne envie de redécouvrir sa ville avec un regard de touriste, prendre des photos, visiter les musées, s'installer à une terrasse, aller à un concert. Un appel à la vie, un appel à l'instant présent.
C'est un véritable coup de coeur!
11/08/2020 : Just kids de Christophe Blanc (2020).
Inspiré de sa propre vie, Just kids est le troisième long-métrage pour le cinéma réalisé par Christophe Blanc.
Ce dernier a décidé de tourner à Grenoble pour son emplacement géographique (enserrée entre les montagnes) mais notamment pour son côté emprisonnant qui permettait d'enfermer les personnages aussi bien physiquement que psychologiquement.
Traitant de la jeunesse face à la mort, ce film est émouvant sans tomber dans le cliché et sans être non plus en train de nous tirer les larmes à chaque instant.
Il y a l'histoire certes, il y a surtout ces jeunes acteurs qui prêtent leurs traits aux personnages. Bien qu'il soit une fratrie de trois, le récit se concentre essentiellement sur les deux frères : l'ainé et le benjamin, interprétés par Kacey Mottet Klein et Andrea Maggiulli.
Si je connaissais déjà Kacey, que j'avais découvert en 2010 chez Joann Sfar dans Gainsbourg (vie héroïque) puis, plus récemment, adoré aux côtés de Virginie Efira dans Continuer de Joachim Lafosse en 2019, je n'avais jamais vu ni entendu parlé d'Andrea. Normal vous me direz, étant donné qu'il s'agissant de son premier rôle.
Impossible de dissocier Just Kids de ces deux acteurs. Tout d'abord parce qu'ils sont aussi impressionnants l'un que l'autre et notamment parce que c'est à travers eux, leur relation, leur alchimie qu'on entre dans l'univers, le monde de ce duo improbable (pas étonnant d'ailleurs que l'affiche soit une photo d'eux deux).
On n'oubliera pas non plus de mentionner Ana Maria Bartolomei qui depuis la première fois où je l'ai vu à l'écran, ne cesse de m'éblouir. J'ai même été déçue qu'on ne la voit pas plus... En tout cas, malgré le fait qu'ils ne se ressemblent pas du tout physiquement, le trio fonctionne quand ils se retrouvent ensemble, orphelins, face au "monde des adultes" sans pitié.
L'autre détail que j'ai apprécié c'est l'idée que, la vie continue, la construction, l'apprentissage est permanent et que même le deuil n'empêche pas les heures de s'écouler, toujours au même rythme. Ainsi, quand Mathis se met à la photographie, il nous montre, par cette passion nouvelle, qu'il existe, qu'il crée et qu'il n'a pas renoncé à son enfance.
J'ai donc été à la fois bouleversée par le scénario, par le jeu, mais aussi par la photographie que j'ai trouvé particulièrement belle. Les séquences de nuit ont été particulièrement bien travaillées.
Il y a cette ambiance aussi et ces moments partagés où la parole laisse la place aux regards, aux gestes. C'est magnifique de voir ces garçons démunis et qui restent pourtant, forts, tenaces, décidés à ne pas baisser les bras face aux obstacles. Le silence face aux cris, le rire face aux pleurs. C'est juste beau.
Just Kids a été une vraie belle surprise pour ma part. J'ai hésité jusqu'au dernier moment d'aller le voir et, encore aujourd'hui, plus de deux mois après, il me reste toujours cette sensation d'avoir vécu une expérience enrichissante, un instant de cinéma qui restera gravé encore longtemps en moi.
Anecdotes :
1. Le réalisateur s'est entouré d'une équipe jeune : « Je tenais à une forme de virginité, d’appétit. Donner les clés du camion à la jeunesse a enrichi le film. Un technicien installé peut avoir la tentation – je l’ai éprouvé – de vous renvoyer sans cesse au budget […]. La jeunesse a des défauts, mais pas celui-ci, pas celui de l’économie […] ».
2. Christophe Blanc joue lui-même le rôle du père, qu'on aperçoit sur des photos et dans le cauchemar de son fils Jack. Délivrant une histoire qui lui est très personnelle, le réalisateur trouvait normal de se montrer devant la caméra. Ce geste a aussi été cathartique : « Il est si difficile d’apaiser tout ça. Ce film est pour les enfants blessés, réellement blessés, celles et ceux qui l’ont été dans leur jeunesse. Il y en a beaucoup. Et ce film est fait pour dire qu’il existe un horizon ».
14/08/2020 : Madame de... de Max Ophüls (1953).
Je ne sais pas si vous vous souvenez mais en janvier dernier, j'étais allée découvrir pour la première fois sur grand écran, Lola Montès, le chef d'oeuvre de Max Ophüls à l'occasion de sa ressortie en salles. Il s'avère que c'était le premier film que je voyais du réalisateur et j'avais été absolument subjuguée.
Ainsi, j'ai décidé, des mois plus tard, de voir (enfin) un autre film de lui, soit Madame de..., sorti en 1953, deux ans avant Lola Montès.
Adapté d'un roman éponyme de Louise de Vilmorin paru en 1951, Madame de... se construit autour d'un seul et même axe, ou plutôt d'un objet : une paire de boucles d'oreille. Par la même, le film a reprit cette idée. L'action évolue donc, tel un manège ou une toupie, par rapport au chemin parcouru par cet accessoire.
Présenté comme cela on pourrait se dire qu'on a peut-être mieux à faire que dépenser 1h45 devant une fiction basée sur une histoire de boucles d'oreille. Que nenni! Vous auriez tort de passer à côté d'une telle oeuvre cinématographique.
Il est remarquable justement d'être fasciné(e) par le parcours de ce bijou, une astuce fantastique qui va permettre aux personnages de se rencontrer, se croiser, s'aimer, se quitter etc...
Parce que oui, ici il s'agit avant tout d'explorer la passion amoureuse, celle qui vous fait perdre toute votre raison, qui vous pousse à l'inimaginable, qui vous dévore, qui vous consume.
Pour tous les amoureux des plans séquences, des scènes de bal, des décors hallucinants, des costumes majestueux, des acteurs grandioses, Madame de... est un film à voir et à revoir sans limite pour sa richesse de mise-en-scène!
Anecdote : Avant de tourner, Max Ophüls donna quelques conseils à Danielle Darrieux concernant son rôle: "Votre tâche sera dure. Vous devrez, armée de votre beauté, votre charme et votre élégance, incarner le vide absolu, l'inexistence. Vous deviendrez sur l'écran le symbole même de la futilité passagère dénuée d'intérêt. Et il faudra que les spectateurs soient épris, séduits et profondément émus par cette image."
15/08/2020 : La huitième femme de barbe bleue de Ernst Lubitsch (1938).
Cinq ans après Sérénade à trois, Lubitsch coopère pour la seconde fois avec Gary Cooper - à l'époque encore jeune premier - et ce pour notre plus grand plaisir!
À l'origine pièce de théâtre écrite par Alfred Poszanski, dit Alfred Savoir, vaudevilliste français d'origine polonaise, La huitième femme de barbe bleue de Lubitsch est la deuxième adaptation cinématographique de cette fantastique comédie (elle fut adaptée une première fois pour le cinéma muet en 1923 par Sam Wood avec Gloria Swanson).
Découvert au lycée, Ernst Lubitsch est un réalisateur que j'affectionne particulièrement mais dont je n'ai pas encore vu l'intégralité de la filmographie (étant donné la prospérité c'est plutôt compréhensible cela dit). Ayant un coffret comportant plusieurs dvds de ses films, j'ai été tentée par celui ci en particulier pour son titre.
Il faut savoir que le mythe de Barbe Bleue possède plusieurs interprétations. En France, par exemple, la version privilégiée est celle d'un mari monstrueux qui tue ses femmes les une après les autres pour les faire payer de leur curiosité jusqu'à ce qu'il soit tué à son tour pour les crimes qu'il a commis. Alors qu'à l'étranger, le personnage de Barbe Bleue a plutôt l'apparence d'un animal fabuleux.
Ici, pas de monstre à barbe bleue repoussant mais un dénommé Michael Brandon (Gary Cooper) qui, malgré ses sept mariages - et donc sept divorces - reste plus charmant que jamais et une fille de marquis (Claudette Colbert) au caractère bien trempé pour lui faire face.
Comme un film de Lubitsch qui se respecte, le rythme ne laisse pas de place aux temps morts, le renouvellement de la source de comédie est incessant, les répliques sont cinglantes (à savoir que le scénario a été écrit par Billy Wilder, qui n'était encore qu'un exilé d'Allemagne), les costumes sont magnifiques. Bref, que des ingrédients de grande qualité pour faire la meilleure recette possible.
Il n'y a pas de doutes : cela n'a pas pris une ride et on ne peut être que divertis par une oeuvre comme celle-là.
À voir seul(e) ou accompagné(e)!
Anecdotes :
1. À la surprise générale, alors que l'âge d'or de la comédie loufoque hollywoodienne battait son plein, le film fut un échec.
2. Barbe Bleue dans le conte de Charles Perrault est un riche gentilhomme qui ne parvient pas à trouver d'épouse à cause de sa barbe bleue qui le rend repoussant auprès des femmes. Un mystère subsiste cependant autour de la disparition de ses six épouses précédentes. Lorsqu'il finit par trouver une jeune femme qui accepte de le suivre dans son château, il lui confie une clé menant à son cabinet secret, mais lui défend de s'y rendre. Malgré ses mises en garde, elle y pénètre et découvre les cadavres des six épouses. Le psychanalyste Brunot Bettelheim note des origines scandinaves ou russes dans la genèse du personnage de Barbe Bleue. Il faut noter que les frères Grimm ont écrit une histoire similaire avec un récit appelé L'oiseau d'Ourdi. Dans le récit de Perrault comme dans celui des Grimm, une symbolique sexuelle évidente est mise en place (la clef, symbole du sexe masculin; et l'oeuf, symbole féminin), ce qui confirme bien la double-lecture sexuelle que l'on peut faire du film d'Ernst Lubitsch.
17/08/2020 : Et Dieu... créa la femme de Roger Vadim (1956).
Cela faisait des années déjà que j'avais le dvd chez moi et à priori rien ne m'empêchait de voir ce film. Et pourtant, je remettais toujours au lendemain le moment de le découvrir. À tort!
Et oui, je ne sais vraiment pourquoi, j'avais des à priori. Peut-être (sûrement) parce que jusqu'alors, je ne comprenais pas la raison pour laquelle tout le monde s'extasiait devant Brigitte Bardot.
Maintenant j'ai compris. Bardot c'est cette insouciance, c'est cette fougue et c'est évidemment cette sensualité qui sont omniprésentes dans ce film. Dès sa première apparition - qui se fait par un plan sur ses pieds -, on n'a d'yeux que pour elle.
Il y a sa chevelure blonde, sa garde robe aussi, sa peau bronzée... (j'ai particulièrement aimé sa robe de mariée je dois l'avouer haha).
Et puis on n'oublie pas non plus Jean-Louis Trintignant, qui même si son rôle ne le met pas forcément en valeur, prouve qu'il a un charisme évident.
Enfin, il y a la photographie d'Armand Thirard avec ces couleurs vives et la musique écrite par Paul Misraki qui participent à la joie procurée par Et Dieu... créa la femme.
J'ai adoré!
Anecdotes :
1. 21 ans après Et Dieu... créa la femme, Roger Vadim réalisa lui-même le remake américain du film. Le film portait le même nom, mais l'histoire était un peu différente. Au casting, on trouvait notamment Rebecca De Mornay et Frank Langella.
2. La "Bardot mania" que suscita le film fut d'abord un phénomène américain avant d'être français. Passé relativement inaperçu malgré quelques manifestations vertueuses, les violentes tentatives d'interdiction outre-Atlantique attirèrent la curiosité du public américain qui en fit un véritable succès. Les instances catholiques de Lake Placid tentèrent notamment d'acheter tous les billets du cinéma exploitant et menacèrent d'excommunication quiconque verrait le film. Comme une bombe à retardement, le phénomène BB débarqua ensuite en France.
Voici donc pour mes cinq coups de coeur cinématographiques. J'espère que cela vous a plu et vous souhaite à tous un merveilleux samedi!
J'ai bien envie de voir Eva en Août et Just Kids grâce à ton article :) J'avais adoré Et Dieu créa la femme, je suis contente qu'il t'ait plu ♥
RépondreSupprimerRavie que ces deux films te donnent envie!
SupprimerTu m'en diras des nouvelles :)